Le chacal déguisé en girafe

Le Chacal déguisé en girafe…
(petit illustré d’une apprentie girafe)

[Cet article est un partage sur mon cheminement de bébé girafe, à l’endroit où j’en suis et ne se veut pas comme représentatif de ce qu’est la CNV…pour aller plus loin vous pouvez jeter un œil sur leur site ou auprès d’un formateur certifié.]

Cela fait maintenant plus d’un an que j’ai entrepris de me former à la Communication Non Violente. J’ai fait les deux premiers modules d’introduction l’an dernier…et je ferais le module 3 prochainement…et depuis je tente de pratiquer.

 

Dur labeur que le « parler girafe ».
Déjà il n’a souvent rien de naturel et le placer dans une conversation peut paraitre incongru voir carrément mal pris par un interlocuteur non averti.
« Tu me saoules !!!!! »
« Lorsque tu dis « tu me saoules », je me sens triste car j’ai à cœur de pouvoir communiquer avec toi dans le respect…comment c’est pour toi quand je te dis ça? »
« Non mais tu te fouuuus de ma gueule »

Vous voyez le topo, le pauvre petit chacal que je suis, qui tente maladroitement de communiquer avec le cœur est confronté bien souvent à diverses difficultés.

(Sans compter toutes les fois où je m’exprime juste en chacal !)
– lorsque l’autre n’est pas au courant de mon souhait de causer girafe (ou n’est pas ok).
– lorsque j’essaye d’utiliser le processus OSBD* sans avoir clarifié ce que je vis et mon intention.

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C’est ce point-là dont j’avais envie de vous parler un peu plus longuement. C’est ce point-là qui est je crois source de tant de malentendus.
Ce que j’expérimente c’est que sans clarté sur ce que je ressens et sans clarté sur mon intention je peux vite avoir tendance à jouer la girafe sans l’incarner. Cette utilisation du processus et du langage n’est pas la CNV.
Exemple vécu (avec l’aimable relecture et autorisation de « l’Autre »):
Je me retrouve à la terrasse d’un café avec une personne chère à mon cœur (appelons le « L’autre »). En attendant notre repas, nous discutons.
Nous essayons de discuter serait plus juste…mais bien campés l’un et l’autre sur nos positions nous ne nous écoutons pas réellement. Cette personne agacée finit par se fermer et me dit qu’elle ne veut plus en parler.

Instant en suspens. J’essaye de rentrer en lien : « on ne parle plus de ce sujet mais est-ce qu’on peut parler de cette contrariété ».
« Non »
Je suis piquée et je commence par être submergée par mes émotions…mais je n’en ai déjà plus tout à fait conscience, alors j’ironise : « Alors on fait semblant que tout va bien et on parle d’autre chose ».
L’Autre sur un ton agacé « J’ai besoin de silence… »
« Et bien puisque tu as besoin de silence, je vais respecter ce besoin et te laisser déjeuner en paix »…dit avec un ton cinglant, parfaitement cynique.
Et sur ces mots je me lève, rentre dans le café et me mets au comptoir pour manger en papotant avec les personnes qui y travaillent.

Bon…clairement là j’ai mis mes oreilles de girafe sur ma tête de chacal et j’ai formulé des mots enrobés de miel bien éloignés de mon ressenti et d’une intention de me mettre en lien avec l’Autre.
L’Autre d’ailleurs vexé comme un pou sera fâché de ma réaction pendant quelques temps…
Et il nous faudra tout notre amour et notre envie de nous remettre en lien pour reparler de cet épisode, de ce qui nous a traversés en cet instant et nous pardonner…

 

Alors qu’est-ce qui s’est passé? Et qu’est-ce que j’aurais pu faire?

 

Ce qui s’est passé

A l’instant où la conversation se coupe, je ressens une grande tristesse et une grande peur. L’Autre ne veut plus me parler. Quelque chose en moi s’active comme « l’Autre ne m’aime plus ». Alors avec maladresse et désespoir je tente de comprendre pourquoi. Pas pour me mettre en lien profond avec lui comme je le laisse supposer… mais surtout pour me rassurer. J’adresse une demande mais en réalité elle n’est pas négociable.
Pour l’Autre : Fatigué et irrité par d’autres soucis, l’Autre est à fleur de peau mais je ne l’ai pas vu. Il n’a pas la clarté sur l’intensité de cet état et je ne l’ai pas entendu. Lorsqu’on commence à se disputer il sent la colère monter. Ne sachant pas comment gérer cette émotion sans m’exploser à la figure il nous protège en tombant dans le mutisme.

 

Quand mes tentatives pour comprendre ce qui se passe se soldent par un non je sens la colère monter moi aussi. Intérieurement je me dis que l’Autre ne fait aucun effort (« contrairement à moi bien sûr »)…je ne sais plus quoi faire de mes émotions…j’ai désespérément besoin de me sentir en lien avec lui…alors j’opte pour l’ironie (allez savoir pourquoi ?!).
Pour l’Autre : Submergé par ses émotions, l’Autre sent qu’il a besoin d’un temps pour se récupérer…il l’exprime en me disant « J’ai besoin de silence ».
Pour moi le « j’ai besoin de silence » est vécu comme un refus entier de toute ma personne.
Ce qui s’est passé est parfaitement bien illustré par cette courte vidéo…ce qui est vrai pour les enfants l’est aussi pour les grands. Lorsque les émotions sont intenses, le cortex se « débranche ». Si je ne parviens pas à le rebrancher et à conscientiser ce que je ressens je ne parviens pas à me relier à l’autre, ni à moi-même.

Qu’est-ce que j’aurais pu faire ?

Pour commencer prendre le temps d’accueillir ce qui se vit en moi et me donner de l’empathie. C’est la fameuse Auto-Empathie que j’évoquais dans Pratiquer la CNV avec ses enfants. Prendre ce temps c’est là toute la difficulté de beaucoup d’apprentis girafe. Je n’ai pas été habituée à faire la clarté sur ce que je ressens et sur ce dont j’ai besoin. Lorsque se passe un événement qui me secoue, le chacal en moi aboie et parfois je réagis avant même d’en avoir conscience. Le plus difficile étant pour moi de différer juste de quelques instants ma réaction. Quelques instants pour faire la clarté sur ce que je vis et pour m’offrir de l’empathie si besoin. Ces instants lorsque je les prends me permettent de me mettre en lien de cœur à cœur avec l’autre…car j’ai déjà fait ce lien avec moi-même.
Concrètement quelques mots pourraient suffire pour donner l’information à l’autre que j’ai besoin d’un temps de réflexion, de recul, appelez-le comme vous voulez. Boire un verre d’eau peut ramener de la conscience en se reconnectant à son corps. Pratiquer des exercices de brain gym qui vont permettre de recréer des liens entre cerveau limbique (siège des émotions) et cortex (siège de la pensée), exemple en voici un trouvé sur le site apprenons.eu https://docs.google.com/file/d/0BxuQ3rrbY-iVUXhjWkZDbVhtSEU/edit , pratiquer la respiration consciente (comme décrite dans un chapitre de cet article).

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Pour résumer, à toi chère apprentie girafe qui -peut-être- rencontre parfois quelques difficultés à redéployer la CNV dans le réel, voici deux points qui me paraissent importants pour pratiquer :

– Trouver des personnes avec qui tu pourras t’entrainer à utiliser le processus OSBD* et à muscler tes oreilles de girafe. L’idée étant de passer comme un contrat en expliquant à ces personnes que tu as besoin d’espace pour utiliser la CNV et en leur demandant s’ils accepteraient de te consacrer un temps pour cela. Ce temps peut être délimité dans sa périodicité (1x/sem, 1x/mois,…), dans sa durée (pendant 6 mois, 15jours), son lieu, etc.
– Pratiquer -surtout- l’Auto-Empathie…pour avoir les ressources d’un lien de cœur à cœur avec les autres, je peux me donner des espaces d’écoute et d’empathie…seule ou accompagné avec une écoute bienveillante.

 

La maîtrise du processus OSBD n’est pas le cœur de la CNV, c’est un processus. Le terme est juste : il vient du latin « pro » au sens de « vers l’avant » et de « cessus » qui signifie « aller, marcher »…il s’agit donc d’aller vers l’avant, d’avancer.

 

Si j’osais…allez j’ose !

Le processus n’est qu’un chemin pour se relier à l’autre et à soi-même…le reste n’est qu’amour.

 

* Observation Sentiment Besoin Demande

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